L’exclusion d’un associé est une opération délicate, dont le risque contentieux est important. La Cour de cassation est venue à plusieurs reprises encadrer les décisions d’exclusion prises en assemblée, contrôlant que l’associé exclu de la société, ne le soit pas du vote de la résolution portant sur son exclusion.
Un nouvel arrêt est venu préciser les exigences de la Cour de cassation en la matière.
Les statuts d’une société peuvent prévoir une clause permettant d’exclure un associé (dite clause d’exclusion).
Depuis l’arrêt d’Hem du 23 octobre 2007, il est néanmoins admis qu’une telle clause ne doive pas interdire à l’associé, dont l’exclusion est envisagée, de voter sur la proposition ; à défaut elle serait réputée non écrite et l’exclusion serait nulle.
Un récent arrêt rendu par la Cour de cassation le 24 octobre 2018 est venu affiner l’interdiction.
En effet l’arrêt d’Hem pose le principe selon lequel, en application de l’article 1844 du Code civil, tout associé a le droit de participer aux décisions collectives et de voter ; les statuts ne pouvant déroger à ces dispositions.
En pratique les rédacteurs ont pu contourner l’interdiction en confiant la décision d’exclusion à l’organe de direction ou à un tiers. Ou encore, en jouant sur les droits de vote de l’associé exclu (lorsque la forme sociale de la société le permet) de manière à ce que son vote ne fasse pas obstacle à la décision, quand bien même il serait majoritaire ou disposerait d’une minorité de blocage. Cependant, cette pratique de contournement non validée par la jurisprudence paraissait risquée.
Par un récent arrêt du 24 octobre 2018, la Cour de cassation est venue affiner son interprétation de l’article 1844 du Code civil.
Dans cet arrêt (concernant une société civile de moyen, mais dont l’application fait écho à toutes les autres formes de sociétés), les statuts prévoyaient que l’exclusion était adoptée « à l’unanimité des voix moins les voix de l’associé mis en cause ».
L’associé exclu pouvait donc participer à la décision et voter… son vote n’étant simplement pas pris en compte pour le calcul des voix…
La Cour de cassation a validé la rédaction de la clause, malgré sa rédaction qu’elle considère « malheureuse » car, si l’article 1844 du Code civil impose la participation de l’associé exclu à la décision relative à son exclusion, il n’impose pas en revanche que son vote soit efficace.
Ainsi, la Cour de cassation fait une interprétation stricte de l’article 1844 du Code civil, considérant qu’écarter la voix de l’associé exclu n’est pas contraire aux dispositions de cet article, tant que l’associé est mis en mesure de participer et de se prononcer sur la décision. Cela signifie que les voix de l’associé exclu doivent être prises en compte pour le calcul du quorum, mais pas forcément pour déterminer le sens de la décision.
Cet arrêt devrait permettre aux rédacteurs de statuts de laisser cours à leur imagination dans la réaction de clauses d’exclusion.
Salomé GARLANDAT
Ajouter une réponse